EXPERTISE SUR LA CONDUITE DU PROJET PROXIMA
LA DEMANDE
Les représentants du personnel aux CHSCT Mairie de Toulouse et Toulouse Métropole ont désigné le cabinet Midi-CTES pour réaliser une expertise au sujet de la conduite du projet Proxima afin de repérer les éventuels risques, notamment psychosociaux, pour les agents des deux collectivités.
CONTENU DU DOCUMENT
Notre mission d’expertise nous a permis d’étudier une soixantaine de documents, de récolter 1851 questionnaires exploitables, de nous entretenir avec l’ensemble des DGA et des directeurs/
directrices des directions les plus impactées. Les entretiens collectifs nous ont permis de rencontrer environ 250 agents. Le rapport que nous avons rendu en juin 2023 est composé de quatre parties pour un total de 142 pages. Nous vous proposons dans ce feuillet une synthèse à destination des agents de la collectivité qui reprend, à grand trait, son contenu. Pour chaque partie, nous indiquerons les pages afin que vous puissiez vous rapporter au document final.
CHRONOLOGIE DE L’EXPERTISE
Octobre 2022
- Etude documentaire
- Entretiens avec l’équipe projet
- Proxima
- Entretiens avec l’ensemble des
- DGA
Décembre 2022 Juin 2023
- Déploiement du questionnaire
- Entretiens avec les directeurs des directions les plus impactées
- Entretiens collectifs avec les agents des directions les plus impactées
- Restitutions du rapport final en FSSSCT et en CST
- la suite
SOMMAIRE
- Analyse de la conduite du projet par phase
- Anticipations sur les risques liés au projet
- Pistes d’actions pour la préservation de la santé physique et mentale des agents
A l’issue du CST de juin 2023, il a été convenu que le cabinet Midi-CTES poursuivrait l’accompagnement des élus tout au long de la mise en place du projet Proxima. Nous proposerons, à destination des instances représentatives, des modalités d’accompagnement, de régulation et de suivi pour rester attentif à la santé et la sécurité des agents lors de la phase opérationnelle. Pour toute question ou remarque concernant la conduite du projet Proxima, vous pouvez nous contacter par mail ou bien par téléphone : contact@midi-ctes.fr / 07.66.15.92.34
État des lieux des conditions de travail au sein des deux collectivités
LES PRINCIPALES CONTRAINTES À L’ACTIVITÉ DE TRAVAIL
Intensité et complexité du travail
Temps pour accomplir sa mission
- 38% des agents considèrent n’avoir que parfois ou jamais le temps suffisant pour accomplir leur mission
Interruption des tâches
- 55% des agents indiquent qu’ils sont toujours ou souvent interrompus dans leurs tâches
Ordres contradictoires
- 32% des agents considèrent ne jamais recevoir d’ordres contradictoires
Epuisement au travail
- Seuls 10% des agents considèrent n’être jamais épuisés par le travail. Plus de 30%, soit près d’un agent sur 3, considèrent l’être souvent ou toujours.
Exigences émotionnelles
Exigences du public
- 2 agent sur 3 doivent toujours ou souvent répondre immédiatement aux demandes du public.
Victimes d’agression
- Près de la moitié des agents ont déjà fait l’objet d’agressions physiques ou verbales dans le cadre de leur travail.
Peur au travail
- Aujourd’hui, 23% des agents déclarent avoir parfois peur au travail.
Origine des données présentées Ces données sont tirées du questionnaire distribué lors de l’expertise à 4375 agents. Nous avons reçu 2059 réponses. 1851 questionnaires étaient exploi tables. Cette participation assure une représentatii té à 95 % avec une marge d’erreur de 3%.
LES PRINCIPALES RESSOURCES POUR LES AGENTS
Rapports sociaux au travail
Soutien des collègues
- 73% des agents déclarent que leurs collègues sont « toujours » ou « souvent » un soutien au travail.
Soutien des supérieurs
- 61% des agents déclarent que leurs supérieurs sont « toujours » ou « souvent » un soutien au travail. Il y a une exigence forte de soutien de la part des agents vis-à-vis de leur supérieur.
Valeur du travail
Sens du travail
- 74% des agents trouvent du sens à leur travail. Qualité du travail
- 73% peuvent savoir si leur travail est de qualité ou pas.
SANTÉ, BIEN-ÊTRE ET ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL
synthese de l’étude RPS format original
Analyse de la conduite du projet Proxima par phase : Les éléments-clés
L’ANNONCE DU PROJET
LES BOP
- Le projet s’inscrit à la suite de nombreux autres bouleversements au sein de la collectivité (réorganisations précédentes, Covid, 1607h).
- De grandes disparités d’accès à l’information selon la direction d’appartenance et le grade
- Les changements d’orientation de Proxima (projet dit itératif, c’est à dire avec des changements d’orientation tout au long de sa construction) ont distillé des informations contradictoires aux agents.
LA COMMUNICATION
- Une communication massive avec 43 initiatives depuis septembre 2021 grâce à l’appui d’un service communication renforcé pour l’occasion
- La communication autour du projet a été verticale et descendante, souvent éloignée des problématiques concrètes à propos du futur travail réel des agents.
- Au mois de décembre 2022, 650 agents (sur les 1850 questionnaires exploitables) déclaraient avoir reçu insuffisamment ou pas du tout d’information. Ceux là sont 90% (soit 600 agents) à avoir un niveau de compréhension du projet mauvais ou incomplet.
LA COMITOLOGIE
- Une équipe projet composée de chargés de projet attachés exclusivement à Proxima, d’autres en maintien de responsabilité avec des surcharges constatées
- Un début prometteur dans la construction de la future organisation mais dont la dynamique aurait brutalement été bloquée au moment des RACI en raison d’enjeux liés à la réorganisation.
- Une détérioration grandissante de l’ambiance de travail de l’équipe projet et des groupes de travail qui a pu entrainer le départ d’acteurs majeurs de Proxima
LES RACI
- Les «Responsable, Associé, Consulté, Informé» (RACI) ont eu pour fonction de faire état de l’organisation actuelle et de projeter les missions en territoire.
- L’exigence de rapidité d’exécution (3 semaines à 1 mois) a conduit à deux phénomènes : une charge de travail intense pour les niveaux managériaux/RH et un manque d’harmonie.
- Le RACI s’est avéré peu adapté. Il y a aujourd’hui un écart non soldé entre les postes nécessaires et les agents disponibles en territoire. Il y a trop de postes projetés et certaines missions sont sous-évaluées. Un agent va t-il faire un travail pressenti pour deux ? Comment la répartition va-t-elle se faire lorsque 4 agents devront couvrir 5 territoires ?
- Selon l’administration, 75 % des agents ont eu leur premier vœu accepté, 90% leur premier ou deuxième vœu au coeur d’une mobilité interne sans précédent.
- Il y a eu de nombreuses évolutions chez les directeurs et chefs de service. L’essentiel des phénomènes d’évolution se situaient chez les cadres A.
- Il persistait dans les entretiens collectifs de forts ressentiments à l’égard des règles formelles et informelles qui ont balisé le chemin des Bourses aux postes (BOP).
- La promesse de «mobilité professionnelle», véhiculée par certaines directions pour les cadres B et C, n’a pas été tenue. La candidature par le scoring ne le permettait pas.
- Certaines fiches mission ne comportaient ni horaires fixes, ni lieu de prise de poste, ni contenu de l’activité. • Les agents, selon leur direction, leur service, leur rapport à la hiérarchie, n’ont pas toujours eu accès aux mêmes informations et/ou aux mêmes opportunités. • Il y a eu des irrégularités de procédure (notation, fiches mission, nombre de poste, publication tardive/ retrait de poste).
- Une inquiétude forte persiste concernant une possible mobilité forcée d’agents insatisfaits des BOP.
RÉSEAUX MÉTIER
- Les réseaux métier ont pour vocation de proposer une nouvelle façon de travailler dans la collectivité qu’on appelle «organisation matricielle» : une ligne hiérarchique et un réseau transverse qui fait le lien entre direction métier et services métier en territoire.
- A l’heure actuelle, le périmètre et les modalités de fonctionnement ne sont pas définis.
- Une inquiétude subsiste quant à l’absence de prise en compte, dans les RACI, de ce temps de coordination en tant que temps de travail effectif.
PÉRIODE TRANSITOIRE
- Il existe un risque de surcharge et/ou de rupture de continuité de service, notamment chez les managers, dans le chevauchement entre les responsabilités actuelles et les responsabilités futures.
- Il n’y a pas de règles formelles concernant la transition de l’ancien organigramme au nouveau et la passation des missions, dossiers, affaires, projets n’est pas encore précisée à l’heure actuelle.
- Le départ de la phase opérationnelle au 1er janvier 2024 est source d’inquiétudes, voire d’angoisses puisque les ressources des agents (cf. p.2) seront mises à l’épreuve, sans pouvoir s’appuyer sur une organisation stabilisée par ailleurs.
Anticipations sur les risques liés au projet
Un projet d’envergure
Il s’agit d’un projet d’envergure qui ne se limite pas à un départ en territoire. Il y a de nombreuses réorganisations en central et de nombreux projets connexes à Proxima pourront venir modifier le travail. Il faut être attentif à chaque situation de travail puisque c’est l’ensemble de la collectivité qui change de schéma directeur.
Les enjeux liés à la proximité
44 % des agents ont été agressés au cours de leur carrière et un quart des agents ont « parfois », « souvent », « toujours » peur au travail. L’augmentation de la proximité (plus d’offres), conjuguée à un effet de déqualification (nouvelles missions), peut entrainer une augmentation des conflits et donc des risques de violences externes.
Organisation matricielle du travail / Bouleversement de l’organisation
- Nouveaux périmètres de compétences pour les diffé rents services de SoRH
- Eclatement de nombreux collectifs de travail • Un besoin en formation pour les nouvelles missions qui pour le moment n’est pas évalué
- Une nouvelle organisation à s’approprier
Mobilité géographique
La mobilité géographique, même minime, risque de contrecarrer l’équilibre actuel entre vie professionnelle et vie privée. Aujourd’hui, 73,4% des agents déclarent concilier souvent ou toujours vie pro et vie perso. Des agents aux horaires atypiques ou matinaux ne bénéficient pas d’une offre de transports publics toujours adaptée. L’angoisse est réelle, surtout pour des femmes seules.
Inquiétude sur les changements de métier et l’avenir du service public L’organisation matricielle du travail, si elle est mal conçue,
peut créer des situations d’ordres contradictoires et des tensions organisationnelles. Cette nouvelle culture du travail doit pouvoir s’adapter à l’agent. Pour cela, il est primordial d’être en mesure de correctement définir les procédures et processus, les règles de partage, notamment budgétaires, en territoire et en direction métier pour s’assurer de la cohérence du déploiement de la politique publique et de la santé des agents.
Il existe des risques réels d’inadéquation entre l’identité de métier de l’agent et la manière dont ces missions vont être définies en territoire et en central dans la nouvelle organisation. La construction du projet est jusqu’à maintenant restée à distance prononcée du travail réel.
Le projet Proxima est perçu par certains agents comme un renforcement de l’encadrement au sein de la collectivité. Ils se demandent si cette opération n’est pas destinée à externaliser les missions dites «exécutives» dans un futur proche, ce qui engendre une incertitude sur l’emploi.
Les pistes d’action pour y faire face
Créer des espaces de régulation
- Anticiper la création des réseaux métier, par la mise en place d’une organisation paramétrée et dotée pour la période transitoire afin de réduire les écarts déjà constatés
- Construire les futurs réseaux métier à partir d’unités de base « Réunion de service » dès le 2 janvier 2024 • Mise en place d’un retour d’expérience à partir d’octobre 2024 pour un rendu à l’anniversaire de la nouvelle organisation
Engager une réparation individuelle et collective
- Communiquer dès maintenant publiquement à destination des agents fragilisés par la mobilité interne. Il est important que cette situation ne les renvoie pas à un échec personnel mais bien à la procédure collective du projet.
- Mettre en place une GPEC
Réagencer le schéma de prévention des risques
- Créer un réseau de prévention efficace, sous la forme d’un réseau métier
- Harmoniser les éléments de prévention (DUER, schéma de prévention), y compris les méthodes de recueil des données chiffrées pour produire des indicateurs stables aptes à identifier les risques au sein de chaque service
- Renforcer le droit d’expression des agents et intégrer ce droit à l’éco-système du CST
Faire le Bilan de la mobilité
- Produire un document « Bilan de la mobilité au sein de la collectivité depuis septembre 2021 » à destination du CST (ETP réellement déconcentrés/ ETP projetés, entrée et sortie du personnel, l’effort de formation)